Psychologie de l'enfant et de l'adolescent 21ème - 7ème cours 21.01.00

L'interprétation des rêves

Le rêve d'Irma

Dans une grande salle il y a beaucoup d'invités que le rêveur reçoit. Il est l'hôte de réception. Parmi les invités il y a Irma. Le rêveur la prend de côté, lui montre une lettre et lui fait des reproches de refus. Il dit :"Si vous souffrez toujours, c'est de votre faute." Elle répond : "Si j'avais su…, le problème d'étouffement dans ma gorge…"

Un autre invité, Otto constate qu'Irma est souffrante et en informe le rêveur. Il est alarmé et l'ausculte quand même. Il la trouve pâle et gonflée et se dit (le rêveur est médecin) qu'il aurait peut-être négligé un trouble organique. Il l'examine près de la fenêtre mais elle est récalcitrante. Pourtant sans raison. Une amie se tient là et ouvre la bouche sans hésitation, mais c'est Irma qui doit l'ouvrir ! Dans la gorge il y a une grande large plaque blanche. A un autre endroit, il découvre une structure bizarre qui ressemblent aux os sturbinaux du nez (caractère spongieux au début du nez).

Il appelle le Dr. L. M. qui l'examine à son tour et confirme le diagnostique du rêveur. Le Dr. L.M. paraît très différent, il est pâle et il boite. Son menton est rasé (parce qu'avant il avait la barbe). Un ami du rêveur, Otto, se trouve debout derrière Irma. Un autre joue des percussions sur les poumons d'Irma (auscultation des poumons par tapotement dans le dos pour entendre l'effet de caisse de résonance): il découvre une zone opaque. L'épaule gauche est infiltrée. Il n'y a pas de doute, c'est une infection et une bonne dysenterie éliminera les toxines. Peu de temps avant, Otto lui avait fait une piqûre de [nom chimique et formule du produit]. C'est une injection spéciale avec une aiguille pas propre.

Le rêveur et sa méthode

Celui qui avait rêvé d'Irma, était Freud lui-même. C'est un rêve autoréalisateur et présente les caractéristiques suivantes :

C'est la méthode employée par Freud pour rendre compte de l'activité onirique. Dans le récit du rêve, Freud rapporte l'interprétation par associations et la relie à des situations précises. Cette manière de faire donnera la méthode des associations libres plus tard.

 

 

 

 

 

Jusqu'en 1900, lors de consultations Freud donnait son opinion très vite au patient. Sans se soucier si le patient l'acceptait. Celui-ci devait se débrouiller avec. Puis, à partir de 1900, il n'accepte plus de donner une interprétation. Il attend que le patient ait lui-même accès aux différents moments du rêve. C'est le patient qui doit donner l'interprétation. En conséquence les séances pouvaient se rallonger considérablement !.

Freud utilisait la méthode maïeutique comme Socrate. (maïeutique : méthode de réflexion, de la philosophie socratique, qui permettait à un individu de formuler des pensées qu'il croyait ignorer.

L’art socratique du dialogue, en qui se résume la manière socratique de philosopher, tient à peu près dans l’image de la "maïeutique", art d’accoucher les esprits, que Socrate disait tenir de sa mère; encore faut-il ne pas oublier que l’accoucheuse, matrone qui a elle-même passé l’âge d’enfanter, a compétence aussi pour juger si l’enfant est viable ou non, et sait se faire avorteuse au besoin.

La situation d'Irma dans le réel :

Freud soignait Irma. La cure analytique arrivait à son terme mais la solution n'était pas satisfaisante. Irma était toujours hystérique.

La nouvelle du malaise d'Irma est donnée par Otto. Freud y voit un reproche voilé ce qui le met en colère car il n'admet pas la frustration. Freud accuse Otto du malaise d'Irma.

Les sources du rêve

Les désirs dans le rêve peuvent provenir de sources différentes :

 

Interprétation de l'injection faite à Irma

L'idée que c'est Otto qui doit être blâmé est marqué par l'injection, présumé mal donnée. Cette idée passe dans l'Inconscient puis dans le Préconscient de Freud. Le reproche passe à travers la piqûre. Otto a accompli un acte qui permet de rester objectif.

 

Les deux formes du contenu du rêve

Nous avons un contenu manifeste : ce qu'on peut raconter

Nous avons un contenu latent : ce qui se cache derrière

Comment le contenu manifeste du rêveur s'exprime-t-il ?

Comment le contenu latent du rêve ne s'exprime pas ?

Pour Freud, le rêve est le gardien du sommeil car le rêve exerce une distorsion des pulsions. Il ne nie pas les rêves explicites. Ce n'est pas parce que le contenu érotique est clair, que le contenu soit clair.

Il y a une analogie avec César qui passe le Rubicon et qui dit "alea jacta est" "advienne que pourra", "les dés sont jetés". Mais la nuit précédente César avait rêvé qu'il faisait l'amour avec sa mère. L'interprétation se trouve dans le contenu érotique qui cache le désir réel de la prise du pouvoir de Rome, qui est représenté par la louve qui allaite Romulus et Remus. La louve symbolise le rapport sexuel avec sa mère.

C'est pourquoi le contenu latent est le désir de la prise de Rome, et le contenu manifeste, l'acte d'amour avec sa mère.

RUBICON

Petit fleuve côtier qui se jette dans l’Adriatique non loin de l’actuelle Rimini, le Rubicon, au temps de la République romaine, sépare la Gaule cisalpine de l’Italie. Aucun général romain ne doit franchir cette frontière naturelle pour pénétrer en Italie sans l’accord du Sénat, sous peine d’être déclaré ennemi de Rome. Fleuve, ou plutôt modeste rivière, que Jules César traverse malgré tout, le 12 janvier 49, à la tête de la IIIe légion. Ce dernier a compris la valeur symbolique de ce cours d’eau et donna à cette traversée sans péril immédiat un caractère religieux, une importance politique qui dépasse la seule notion géographique. Il a fait lâcher des chevaux dans les champs qui bordent les rives du Rubicon pour apaiser les dieux, et il s’est élancé à la tête de ses troupes en s’écriant, nous rapporte Suétone: "Allons où nous appellent le langage des dieux et l’injustice de nos ennemis. Les dés sont jetés." Non seulement César joue sa carrière et entre dans l’illégalité, mais en même temps, au moment où il franchit le Rubicon, il se sent habité par une force divine. Le Rubicon est un de ces lieux historiques qui ont valeur de symbole.

La conséquence de la censure du rêve est le déplacement. Le but en est de distraire l'attention du contenu latent. La censure s'assure que les idées offensantes n'apparaissent pas offensantes dans le rêve.

Le rêve gardien du sommeil; il exerce une censure et une distorsion des contenus latents : c'est le travail du rêve

Lors de l'analyse du rêve, la distorsion apparaît sous une forme de résistance.

En effet des désirs peuvent être associés à des pulsions qui réveilleraient le rêveur et donc le rêve ne serait plus gardienne de l'accomplissement. Donc pendant le sommeil, la résistance provoque une agitation chez la personne nerveuse.

Le Moi est affaibli dans le contrôle de la situation et donc on peut, dans le rêve, évoquer un certain nombre de désirs, d'affects, qui ne seraient pas stimulés dans la vie réelle à cause du Moi-censure.

Si le rêveur ne pouvait pas rêver, il se réveillerait et essayerait d'accomplir ses désirs dans la vie réelle. Le sommeil doit continuer, et le rêve ne doit pas réveiller le dormeur. La censure pendant le rêve a pour effet d'être hallucinatoire, mais aussi avoir une certaine liberté hors de la censure.

On peut faire une analogie avec le modèle de la Russie sous les Tsars, où les écrits litigieux étaient censurés. Les phrases litiges étaient masqués en noir mais, avec un peu de soin, les phrases cachées étaient reconstituables.

C'est pareil dans le rêve, les "blancs" permettent de comprendre quand même l'ensemble par :

Dans son analyse du rêve d'Irma, Freud fait une association entre Irma et une amie jeune veuve, au moment où Irma ouvre la bouche. Dans son rêve c'est l'amie qui accepte d'examen de la gorge. Cette autre dame est donc plus consentante pour l'examen qu'Irma. Otto est blâmé et Irma est remplacée par l'amie

Donc le rapport affectueux de Freud avec Irma est déplacé sur l'amie (meilleure patiente coopérante). La quantité d'affection reste mais elle est déplacée.

Le transfert, le déplacement est une forme de censure de la relation d'Irma et de Freud. Il n'admet pas ses sentiments pour Irma. Par contre ses rapports seraient moins alarmants avec l'amie.

Chaque rêve est formé d'une plénitude d'idées et d'associations, et est appelé à la condensation sur peu de personnes ou de situations.

Ce travail de condensation et de distorsion c'est le travail du rêve.

L'autre fonction, est l'identification avec d'autres personnes dans le rêve.

Par exemple, Freud est négatif contre Otto et le blâme pour la mauvaise santé d'Irma. Mais la piqûre à une fonction sexuelle de pénétration sous la peau. L'aiguille est pleine d'une substance blanche qui représentation la substance sexuelle.

Le niveau manifeste c'est l'aiguille pas propre.

Le contenu est latent : Otto à Freud

aiguille à pénis

substance à sperme

sale à maladie

Irma est en mauvaise condition, elle est enceinte.

L'autre est veuve et Irma est mariée, donc c'est un adultère de s'attacher à elle.

Le rêve réalise cette différence en permettant à d'autres personnes qui n'ont pas les valeurs morales du rêveur, donc permet d'accomplir à sa place l'acte avec sa patiente. La figure de passage se trouve dans l'exclamation dans le rêve du rêveur : "Mon ami Otto". Ainsi Otto devient blâmable.

Le déplacement et la condensation permettent avec l'identification et l'ambivalence de réaliser les désirs profonds.

Il y a aussi symbolisation des choses qui se passent : le lieu de réception est public, Irma se replace parmi les autres patients. Ce que Freud accepte de faire, c'est d'examiner la gorge de la patiente. La gorge symbolise la substance présente dans l'organe sexuel féminin. Le problème rencontré au moment de l'examen de la gorge c'est la présence de la grande large tache blanche qui symbolise le liquide séminal après éjaculation. Les os turbineux symbolisent le pénis.

Freud exprime le désir d'ausculter la gorge de sa patiente. Mais elle n'est pas prête et se comporte comme si avait des fausses dents à ne pas montrer. C'était un comportement courant à cette époque, de même que la honte éprouvée de porter des fausses dents. Cette association des dents dans la bouche rappelle "le vagin dentu qui vous la coupe !"

Il y a eu plusieurs contrôles d'hommes sur Irma : Freud, Otto, Léopold M. Le symbole est en lien avec la vie du rêveur, mais aussi avec concrétion mnémonique qu'il appellera plus tard l'Inconscient collectif .

Les problèmes se situent lorsque qu'on sexualise à l'extrême les symboles du rêve. C'est que tout devient symbole sexuel :

Tout espace ouvert signifie vagin, tout objet pointu devient pénis. Et toutes les activités de courses ou de danse devient symbole de préliminaires à l'acte d'amour.

Pour Freud ce n'est pas un problème, par contre pour ses collaborateur oui.

Jung et Adler vont changer les limites, Jung s'orientera plutôt vers l'Inconscient collectif et Adler vers les déplacement sur le complexe d'infériorité à surpasser.

Les rêves d'angoisses (déplaisir) à surdétermination du rêve dans ses aspects de plaisirs et de punition

Avec Irma, c'est une situation sans angoisse. La réalisation est hallucinatoire. Il existe dans les rêves enfantins des rêves d'angoisses non pas par plaisir mais par déplaisir.

Freud explique les rêves anxieux par le fait que le rêve a une valeur punitive. Comme les symptômes de névrose qui ont des rêves punitifs. C'est l'instance psychique qui s'exerce : Le rêve utilise le déplacement de non déplacement d'Irma bien que la cure soit terminée. Mais l'accomplissement du désir se trouve dans le fait qu'Irma va mal à cause de la piqûre d'Otto. Mais c'est le rêveur qui veut qu'elle aille mal ! Freud veut rendre Irma enceinte. Situation où le rêveur se punit tout en se cachant derrière Otto qui fasse sur elle ce qu'il n'ose pas.

La Surdétermination (plusieurs causes) se retrouve dans la punition. Dans le rêve d'angoisse, il y a autopunition qui est l'expression d'une répétition compulsive de la situation qui provoque l'angoisse.

Et c'est cette nature répétitive qui va donner lieu en 1920 à la 2ème théorie de Freud Eros / Thanatos. Ce désir de mort apparaît chez Freud comme accomplissement d'un désir :

Le rêve d'angoisse c'est la peur de la castration qui prend toute sorte de forme, qui répète les situations dans lesquels on a eu peur dans la vie réelle. L'enfant de 3-4 ans a réellement eu peur qu'on lui coupe le zizi. Les pulsions de construction et destruction sont de même intensité. Chez le rêveur adulte normal il y a davantage de Eros et moins de Thanatos.

Dans le rêve on peut avoir une situation où l'on transforme quelque chose dans son contraire. Par exemple : dans le rêve d'Irma où d'abord elle refuse d'ouvrir la bouche, cela peut être interprété comme étant la forme d'une projection car elle refuse ce qu'elle désire.

A l'intérieur du rêve, il y a une réévaluation des aspects des valeurs : contenus manifeste et latent, la situation dans son contraire. Les valeurs sont transmués, Freud reste clean, mais en fait il aimerait être à sa place. Le rêve est une forme de dialectique où tout peut se transformer en son contraire.

Le rôle du rêve c'est l'accomplissement des désirs. C'est particulièrement clair chez les enfants : dans le rêve il y a la vengeance contre les parents et les valeurs sociales.

 

 

 

 

 

Rapport avec l'Inconscient

Il y a le travail du rêve qui est fait à partir de plusieurs éléments :

Ce sont ces événements du lointain passé qui vont permettre de toucher le plus loin dans l'Inconscient, c'est-à-dire l'enfant dans les stades psychosexuels de son développement.

Tous les éléments valorisés au niveau Conscient, ont été au départ dans l'Inconscient à puis dans le Préconscient à qui passent à travers le rêve à puis rendu Conscient.

Les pensées les plus subtiles, sont d'abord tenus au niveau Inconscient. Comprendre comment les intuitions secondaires arrivent à l'Inconscient, (l'Inconscient c'est une forme supérieur de l'intelligence) toucher aux tabous dans les moments de créativités c'est changer l'ordre du monde. Il y a danger.

C'est donc travail de l'Inconscient de protéger l'individu.

Puis, à partir de là Freud va reconstituer l'appareil psychique.